BYEBYEBYEBYE d’Antonin-Corto CAUWE à l’Espace jeunes artistes à la BOVERIE.

Depuis 2009, initié par la Ville de Liège le projet Espace jeunes artistes existe. Par jeune, le projet s’intéresse aux jeunes artistes mais aussi à ceux dont la démarche, indépendamment de l’âge, est récente/ nouvelle et qui n’ont pas ou peu proposé d’exposition à titre personnel. Un artiste octogénaire trouverait sa place dans l’espace jeunes artistes s’il respecte ces deux conditions. À ce jour, le jury d’experts chargé de la sélection d’artistes ayant des affinités avec la Province de Liège n’a pas eu à connaître d’octogénaire rêvant d’être jeune artiste. Pour 2022, le jury a choisi quatre artistes, trois femmes – Usha Lathuraz, Athanasia Vidali, Maria Vita Goral – et un homme – Antonin-Corto Cauwe.

Les œuvres doivent s’inscrire dans le domaine des arts plastiques : peinture, sculpture, arts graphiques, textiles, multimédia, installations, vidéo … et s’accorder aux priorités d’un musée d’art contemporain tel la Boverie qui, depuis 2016, abrite leur exposition. Le projet Espace jeunes artistes permet d’accroître la visibilité de leurs travaux mais aussi d’être confrontés aux contraintes de la mise en place d’une exposition dans un espace précisé. En plus, il met en avant des travaux originaux, novateurs constituant ainsi une pépinière d’artistes 

En mars 22, Usha Lathuraz dont la thématique de la mémoire a longtemps inspiré le travail, a occupé les cimaises à la Boverie : constituer des souvenirs, car ils sont les seuls à demeurer, à pouvoir rappeler le temps, l’étirer. Cela implique d’interroger le rapport que nous entretenons vis-à-vis de la réalité et surtout la manière dont nous intervenons sur cette dernière.

En avril et mai, Athanasia Vidali, une artiste grecque explique : lentement, les réponses que je cherchais germent de manière inattendue, à travers les fentes de ma propre perspective. De représentation visuelle, dernièrement, la nature semble émerger en tant que matière formant l’œuvre. Cette dernière, commence à ressembler à un organisme vivant, qui agit sur les questions de manière imprévue et vivante, évoquant des seuils qui vibrent de manière similaire aux tensions territoriales.

En juin et juillet, Maria Vita Goral, une artiste ukrainienne a présenté une installation sculpturale : ce projet invite à l’auto-chorégraphie pour transformer dans un langage intime et sensible les émotions qui sont vécues durant la vie et peut-être au-delà. L’expression des émotions permet de préciser les moments de la vérité personnelle dans un monde en pleine mutation.

Présentement et jusqu’au 2 octobre, le dessinateur et plasticien Antonin Corto Cauwe expose BYEBYEBYEBYE : mon travail se développe essentiellement sur un mode ironique, sous la forme d’une production qui emprunte à la culture populaire, aux loisirs, à l’architecture bourgeoise, ou encore à l’art contemporain. Ces agencements de sujets fonctionnent par analogie, rapport de sens, de formes ou encore de lien affectif afin de permettre des allers-retours entre plusieurs référents pour produire de nouvelles lignes de sens.

Mehmet Aydogdu, Échevin de la Culture, ou Pierre Paquet, directeur des musées de la Ville de Liège présentent les jeunes artistes lors de chaque vernissage.

PARIS : ŒUVRES EN DANGER AU CENTRE CULTUREL WALLONIE-BRUXELLES.                                                                                                                                

En 1976, alors que sur le plateau de Beaubourg à Paris se poursuivait l’édification du Centre Pompidou, Henri-François van Aal, Ministre de la Culture française décidait d’acquérir, juste en face, un immeuble de 1000 mètres carrés. Ce bâtiment deviendra le premier Centre culturel de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Son inauguration, le 26 septembre 1979, par le Ministre Michel Hansenne avait été précédée d’une commande par le Ministre Jean-Maurice Dehousse à de prestigieux artistes dont Felix Roulin, Jean-Michel Folon, Pol Bury, Pierre Alechinsky et Hergé. Celui-ci veilla personnellement, en décoration de l’escalier principal, à la réalisation d’une fresque comportant plus d’une vingtaine de personnages illustrant les aventures de Tintin.

Depuis plus de 40 ans le Centre culturel Wallonie-Bruxelles de Paris a constitué une formidable vitrine pour notre Communauté et nos Régions. Des compagnies théâtrales, des ballets, des chanteurs (Maurane y a fait ses débuts parisiens), des orchestres ont pu présenter leurs dernières créations. La presse française leur a souvent réservé le meilleur écho et les contacts noués à l’occasion des représentations ont été parfois à la base de tournées en France. Le Centre a été classé régulièrement dans le top-cinq des centres culturels étrangers à Paris. 

Depuis 2019, le Centre Wallonie-Bruxelles n’est plus un Centre culturel mais est devenu un Centre d’Art contemporain et se présente comme tel. Finies les représentations théâtrales, terminés les concerts, ou alors uniquement, sous forme de performances ou en version numérique et, pour rompre avec le passé, on a enlevé le portrait d’André Delvaux qui figurait à l’entrée de la salle qui portait son nom. De même, pourquoi cacher la fresque de Hergé présentant la plupart des personnages des aventures de Tintin.

Depuis cet été et jusqu’au printemps 2023, le Centre est en pleine rénovation et transformation en Centre d’Art contemporain. Ces travaux mettent en danger des œuvres importantes pourtant en excellent état. Exposer ailleurs définitivement les œuvres d’Alechinsky, c’est ne pas prendre en compte le fait que l’artiste s’est, bien évidemment, inspiré du lieu et des dimensions des murs pour créer son œuvre. Quel que soit l’objectif de transformation, la valeur de ces œuvres aurait exigé que les travaux en tiennent compte et respectent leur emplacement.

DE LA MAGIE EN CLÔTURE DU ROYAL FESTIVAL DE SPA.

Ce dimanche 28 août vers 22 heures 45’ les lumières se sont éteintes en la Salle des Fêtes du Centre culturel et ont mis fin au Royal Festival de Spa 2022.

Cette clôture d’une manifestation annuelle qui cette année présentait en douze jours et en huit lieux cinquante représentations de trente spectacles, outre bien des activités annexes, a une nouvelle fois attiré un public nombreux généralement très satisfait des programmes présentés. La grande diversité des représentations de ce Festival ouvert par des prestations circasiennes et clôturé par un spectacle de magie n’offre plus une majorité de pièces de théâtre. Nous préférerions que des compagnies professionnelles servent (sans s’en servir) de grands textes comme ce fut le cas avec le Théâtre National Populaire de Jean Villar en Avignon dès 1947 et pendant 20 ans, lors des années du National à Spa de 1959 à 1987, avec le Théâtre de la Cité de Roger Planchon à Lyon-Villeurbanne dès 1960, avec le Théâtre du Soleil d’Arianne Mnouchkine dès 1970, etc…     

Et où – par exemple – trouverait-on aujourd’hui la dizaine de comédiens capables d’interpréter avec justesse les 1.654 alexandrins des cinq actes du Phèdre de Racine ? Mais laissons-là ces considérations budgétairement irréalistes et jugées obsolètes par ceux qui n’ont pas eu la chance d’apprécier l’accueil enthousiaste que suscite entre autres une juste mise en scène d’une comédie ballet de Molière et Lully.

Dimanche soir à Spa, le magicien bruxellois Jack Cooper présenta avec la fréquente participation du public et le concours de sa sympathique assistante Jolijn Antonissen, les aspects classiques de son art depuis les anneaux qui s’attachent et se détachent jusqu’à la séparation en deux parties de sa comparse. Bien d’autres tours tout aussi incompréhensibles étonnèrent ou firent rire des spectateurs ravis d’une soirée leur rappelant des souvenirs d’enfance. Une réussite puisque l’illusion suscita l’émotion.

Avant cette séance de magie, nous avons assisté à, nous dit-on, un spectacle événement : L’amour vainqueur du théâtre chanté en alexandrins blancs (vers non rimés de douze syllabes) d’après un conte merveilleux allemand écrit en 1850 par les frères Wilhem et Jacob Grimm : la Demoiselle Maleen. Le texte, la mise en scène et la musique d’Olivier Py ont été interprétés par Clémentine Bourgoin, Pierre Lebon, Flannan Obé et Antoni Sikopoulos.

Directeur depuis près de dix ans du Festival d’Avignon Olivier Py n’est pas Jean Vilar. Ce n’est pas un scoop. J’ai pour ma part (contrairement à mon épouse et à la très grande majorité du public de la salle Jacques Huisman) détesté ce conte sans sens ni intérêt, où à l’aube d’une guerre une princesse amoureuse d’un prince est enfermée par son père dans une tour dont à la fin du récit elle sortira pour retrouver son amant. Les chants étaient souvent inaudibles et le jeu se révélait constamment excessif. Je reconnais cependant volontiers l’inventivité des décors mis cela ne me permet pas de devenir moins négatif.  En 1956 et 1957 nous allions un ami et moi en auto-stop (il n’y avait heureusement pas encore d’autoroute et nous pouvions lever le pouce le long de la Nationale 7) aux rencontres des jeunes qu’organisait le TNP en Avignon où nous vivions avec enthousiasme une semaine avec Jean Vilar, Gérard Phillipe, Georges Wilson, Marie Casarès, Geneviève Page, Maurice Jarre (et ses fanfares de Lorenzaccio) sans oublier dans de petits rôles Jean-Pierre Darras ou Philippe Noiret … Des moments que nous ne retrouverons plus …

Jean-Marie Roberti

À SPA, UN TRIO POLYPHONIQUE AU SERVICE DE L’IDENTITÉ WALLONNE. 

Ce vendredi soir nous sommes allés dans un vieux quartier de Spa où rue Deleau (qui tombait à verse à notre arrivée !) il y eut une glacière lors des années 1920. Cette glacière est devenue un lieu culturel aménagé pour offrir un accueil agréable.

Dans ce lieu, une demi des 48 pages (ce qui est peu) de la brochure de présentation du Royal Festival de Spa annonçait : La Crapaude.
Nous avons consulté le Dictionnaire du wallon liégeois où Jean Haust écrivait que la crapôde est une fille, une jeune fille (synonyme bâcèle) et aussi une bonne amie (si prominer avou s’crapôde).

Pour moi, ce mot évoque des souvenirs de la seconde guerre mondiale quand nous vivions à Villers-l’Évêque, village de ma grand-mère maternelle où ses frères Mathieu et Nicolas Fastré étaient fermiers. Les gamins que nous étions aimaient taquiner les plus grandes et les plus grands que nous en leur demandant : Où est ta crapaude ? ou bien « Dis-nous de qui tu es la crapaude ? »

À Spa, la crapaude fut vendredi un groupe de trois jeunes et belles filles qui interprétèrent des chants polyphoniques de Wallonie. Elles révélaient avec talent toute la richesse du patrimoine culturel et vocal wallon. Certes pour beaucoup de spectateurs comprendre chaque mot de leurs textes était impossible et elles présentaient donc le sens de leurs chansons lors d’une brève introduction en français.  Elles associèrent aussi le public à leurs chants ce qui créa une atmosphère très cordiale. Elles demandèrent en outre aux spectateurs de chanter des chansons wallonnes de leur choix et nous entendîmes notamment Li Ptit banc ou Li ptite gayôle plutôt que Leyi‘m plorer ou le Chant des Wallons.

Nous tenons à féliciter Caroline Durieux, Pascale Sépulchre et Lydie Thonnard qui par cette contribution à la renaissance des polyphonies vocales de notre région servent l’identité wallonne et démontrent que li wallon n’est nin mwert.

HOUBEN & COOPER

Avant d’aller à La Glacière nous avons vu et entendu en la Salle des Fêtes du Centre Culturel spadois un récital musical atypique avec Greg Houben, le fils de Steve, et Peggy Lee Cooper qui est le nom de scène d’une Sérésienne sans complexe. Le talent exceptionnel de trompettiste de Greg Houben poète à ses heures et la présence scénique débordante de Peggy Lee Cooper constituèrent un agréable apéritif de notre troisième soirée au Royal Festival de Spa.     

Jean Marie Roberti

À Spa, la plus grande Dame au service de l’Art dramatique en Belgique.

Une longue standing ovation a couronné mercredi soir au Royal Festival à Spa l’interprétation par Jacqueline Bir de la pièce A German Life.

Ce monologue d’une heure et demi a été joué avec une maîtrise exceptionnelle. Ce témoignage a été rendu avec une authenticité naturelle qui paraissait simple mais qui en réalité nécessitait une grande compétence professionnelle.

Une telle prestation requiert une parfaite mémoire et une performance physique non négligeable même si c’est le plus souvent assise que cette artiste nous conte cette vie d’une allemande qui vécut plus d’un siècle et se laissa séduire par le régime nazi. Après une telle interprétation qui pose la question troublante nous qu’aurions nous fait ?, il nous semble intéressant de rappeler qui est Jacqueline Bir et que fut Brunhilde Pomsel. 

Madame Jacqueline Bir est née le 23 novembre 1934 en Algérie de parents français, cultivateurs cultivés. Elle réussit brillamment ses études d’art dramatique aux Conservatoires d’Oran puis de Paris où elle rencontra et épousa Claude Volter (décédé en 2002). Avec celui-ci qui y fonda une Compagnie qui porta son nom, elle s’installa en 1957 en Belgique et interpréta une multitude de rôles importants.

Par exemple, il y a une trentaine d’années, elle vint à deux reprises au Festival de Théâtre de Spa à l’invitation d’André Debaar et de Billy Fasbinder. Elle interpréta avec grand succès les rôles-titres de La vie brève de Paul Willems en 1991 et de Charlotte ou la nuit mexicaine de Liliane Wouters en 1993.

Cette plus grande dame au service de l’art dramatique en Belgique qui en septante ans incarna plus de 200 rôles a accepté de s’engager dans une aventure scénique que constitue un monologue retraçant la vie d’une femme allemande Brunhilde Pomsel, née à Berlin le 11 janvier 1911 et décédée à Munich le 27 janvier 2017 à l’âge de 106 ans. En 2016, à partir de trente heures d’entretien avec cette centenaire, un documentaire intitulé Ein deutsches Leben a été présenté au festival international du film à Munich par Christian Krönes, Olaf Müller, Roland Schrotthofer et Florian Weigensamer.

Brunhide Pomsel a d’abord travaillé comme sténographe pour un avocat juif et pendant un moment simultanément comme dactylo pour l’extrême-droite nationaliste. Ayant, à vingt-deux ans, adhéré au parti national-socialiste, elle a été engagée comme secrétaire dans le service d’information de la radio du troisième Reich. Transférée en 1942 au ministère de l’éducation du peuple et de la propagande, elle fut choisie pour faire partie de l’équipe restreinte des secrétaires et sténographes au service de Joseph Goebbels. Elle était chargée de revoir à la baisse les statistiques des soldats allemands tombés au combat et à la hausse les viols des femmes allemande par l’armée soviétique.

Internée sur ordre du NKVD (la police politique stalinienne) dans les camps spéciaux instaurés dans la zone d’occupation soviétique à Buchenwald, Hohenschönhausen et Sachsenhausen elle y resta cinq ans. Libérée en 1950 elle retrouva pendant une vingtaine d’année (jusqu’à sa mise à la retraite en 1971) du travail comme secrétaire pour des radios SWF (Südwestfunk) à Baden-Baden puis à la direction des programmes de la télévision allemande à Munich. À la fin de sa vie elle s’exprima publiquement contre Goebbels qu’elle définissait comme un excellent acteur.

A German Life, la pièce publiée en 2019 par Christopher Hampton, a été adaptée par Dominique Hollier et mise en scène pour Jacqueline Bir par Simon Paco (assisté par Diana David dans une dramaturgie de Sarah Cuny) est une œuvre troublante qui pose la question de la responsabilité qui est la nôtre quant aux options qui déterminent notre existence. La docilité de la masse des exécutants avait elle pour beaucoup l’alternative de la résistance ? La misère de la crise, les horreurs de la guerre, les mirages de la croissance constituent un siècle tragique de la vie allemande qui fut celle de Brunhilde Pomsel interprétée avec l’authenticité qui caractérise le service exceptionnel que Madame Jacqueline Bir rend à l’art dramatique.

Du Music-Hall burlesque.

Ce mercredi soir en guise d’apéritif nous avons eu droit à un double spectacle sans parole agréablement distrayant. Tout d’abord nous avons apprécié une prestation musicale et comique intitulée De Concerto interprétée par Gaêl Michaux et Maxime Dautremont dans une mise en scène de Christophe Thélier. Les deux acteurs sont des mimes qui présentent des séquences musicales avec un humour porteur de dérision. Ce duo suscite l’amusement des spectateurs qui manifestèrent chaleureusement leur satisfaction.

La deuxième partie de cet apéritif musical nous a permis de découvrir le talent du magicien et marionnettiste français Etienne Saglo. Celui-ci incarne le grand magicien Kosmao et son assistante est la marionnette Goupil. Cet autre duo nous offre une prestation qui nous laisse souvent surpris car nous ne pouvons comprendre comment Goupil et son maître réussissent leurs sketchs burlesques. En bref une prestation digne d’un professionnel de grande qualité. Et un début de soirée meilleur que prévu.

Jean Marie Roberti

UN CONSEIL 

Profitez de la promotion relative aux dernières places accessibles au tarif réduit de huit euros pour les deux spectacles suivants : L’Amour vainqueur (le 20/8 à 21 h. et le 21/8 à 19 h.) et Carabistouille (le 21/8 à 18 h.30 et 21 h.).

OUVERTURE CIRCASIENNE DU LXIIIème ROYAL FESTIVAL DE SPA.

Fondé en 1959 par Jacques Huisman, le Festival de Spa fut sous sa direction jusqu’en 1987 puis notamment sous celles de deux duos (Billy Fasbinder et André Debaar  de 1988 à 1998 et ensuite Armand Delcampe et Cécile Van Snick) un Festival de Théâtre devenu sous l’impulsion d’Axel De Booseré Le Royal Festival. Après deux années marquées par la crise sanitaire et les inondations, une cinquantaine de représentations d’une trentaine de spectacles en une douzaine de jours nous sont proposées en huit lieux par ce soixante-troisième festival. Les affiches théâtrales ne sont plus majoritaires et les grands textes (Molière, Shakespeare, etc…) servis par des professionnels respectueux de leur lettre et de leur esprit restant toujours absents, nous avons opéré un choix rencontrant la diversité de la programmation : cirque, musique, magie etc… Après deux spectacles de cirque aérien ce 10 août, nous apprécierons la semaine prochaine le 17 du music-hall puis un monologue de Jacqueline Bir, le 19 de la musique puis de la polyphonie wallonne et enfin le 21 un conte musical puis de la magie.

LUCIE YERLES: Le Solo 

L’intelligente subtilité des cabrioles intellectuelles et sportives de Lucie Yerlès crée, dans Le Solo, son spectacle de tissus aériens, de lumière et de musique, une complicité avec le public et cette empathie suscite la participation de celui-ci.

Lucie Yernès est à la fois une artiste du cirque, une circasienne, qui s’est formée avec rigueur à Châtellerault puis au Québec , puis, suite à une pause imposée par un accident, une psychologue ayant obtenu un baccalauréat à l’U.L.B. (Université libre de Bruxelles).

Cette double formation l’a même conduite en Afrique du Sud et, pour l’UNICEF (institution des Nations unies pour l’enfance), en Turquie et en Syrie. Ses qualités acrobatiques et la grâce et la douceur de son jeu d’artiste souriante ont permis au Royal Festival de Spa de s’ouvrir par un succès très apprécié par des spectateurs nombreux et enthousiastes.

CHEPTEL ALEIKOUM : Les Princesses 

Aleikoum ou aleikoum salam est le salut arabe : Que la Paix soit avec vous et le cheptel est un ensemble d’animaux. Mais la troupe (et non le troupeau) qui après l’avoir présenté une centaine de fois à travers l’Europe, donnait quatre des dernières représentations d’un spectacle-évènement de cirque aérien au Royal Festival de Spa, est, elle, issue de la quinzième promotion du Centre national des Arts du cirque à Châlons en Champagne qui s’est installée dans le petit village de Saint-Agil à Couëtron-au-Perche dans le nord du Loir-et-Cher. Dans une mise en scène de Christian Lucas, trois belles acrobates musclées Carine, Marie et Gatica secondées par Julien, Marc et Matthieu (Émile) et les compositions musicales de Marjolaine, volèrent au-dessus de nos têtes. Revisitant des contes, pour eux une princesse c’est une façon de parler de l’amour. C’est souvent drôle, parfois coquin, voire osé ou facile comme ici l’expression s’envoyer en l’air, mais cela a enchanté un public bon enfant qui réserva à ces Princesses une standing ovation finale.

Jean Marie Roberti

Le corps des pompiers professionnels de Liège a 200 ans.

Les incendies ont toujours été la hantise de l’humanité. Pour les circonscrire, les moyens ont différé selon les époques. Longtemps, à Liège, l’usage le plus courant a été de chercher à étouffer le feu. D’où le nom étouffeur de flammes donné à ceux qui combattent le feu. Les étouffeurs de flammes se recrutent essentiellement parmi les maçons, les ardoisiers et les charpentiers.

Vers le milieu du XVIème siècle, une ordonnance prescrit aux cinq quartiers de Liège – les vinâves – de s’équiper d’une trentaine de seaux en cuir bouilli, de crocs de fer, d’échelles et autres instruments. Le tout estampillé du sceau du perron liégeois et marqué de l’emblème du vinâve. En cas d’incendie dans un vinâve, il est interdit aux habitants des autres vinâves de se rendre là où il y a le feu.

Pour prévenir d’un incendie en ville, un service de guet est organisé du haut de la tour de la cathédrale Notre-Dame et Saint-Lambert. Pendant que vous dormez, Messieurs, en pleine joie, / Je veille sur ma tour. Toute la nuit j’emploie / À prendre garde au feu, et je vois partout / Si le feu par hasard ne se prend pas chez vous.

En 1822, au temps où Liège se trouve être une ville du Royaume des Belgiques, elle se dote d’un corps de pompiers professionnels. Trente- cinq hommes pour une population avoisinant les cinquante mille habitants. Ils ont fière allure dans leurs uniformes de gala : casque de cuivre, habit bleu foncé à col rouge, pantalon large en drap bleu et guêtres de drap noir. 

Les 25 ans du « Dernier Carré » de la RTBF-Liège.

Mis en place par la RTBF en 1993, le plan Horizon 97 prévoit le départ anticipé à la retraite du personnel statutaire. Le départ n’est pas obligatoire mais simplement très recommandé via notamment une prime substantielle. De nombreux membres choisissent la prépension. Visant un objectif financier du service public, le plan Horizon 97 a été l’ancêtre du plan Magellan dont la finalité est identique.

En 1995, à l’initiative de Luc Dardenne, directeur des services techniques du Centre de production RTBF-Liège prépensionné se crée un club de 23 membres dont cinq sont encore en vie. Janine Allard, Pierre André, André Beaumariage, Roger Berlemont, Jean Brumioul, Jenny Bodart, Marcel Counson, Louis Cox, Luc Dardenne, Jo Derniest, Léon Dessart, Robert Dewez, Willy Dulier, Jean-Marie Fraikin,   Francette Gerondal, Yvon Godefroid, Jacques Gouverneur, Henri Greindl, Joseph Gustin, Freddy Helaers, Stefan Kurevic, André Lallemand, Marcelle Imhauser. 

Le choix du nom de l’association ne fut pas long. Chacune et chacun se rallie à la suggestion de la dénomination : Dernier Carré. Souvenir de ces carrés de ces Grognards devenus Vieux de la Vieille gardant à l’esprit l’idée de ne jamais se rendre. Le but premier du Dernier Carré tel que le définit Luc Dardenne est de garder le contact entre anciens collègues du Centre RTBF-Liège, de conserver l’air de famille qui y règne. Pour ce, une réunion mensuelle est prévue. La première partie est consacrée à un échange d’informations, la seconde à la réception d’une personnalité exposant une matière dans laquelle elle est experte. Les sujets sont très variés. Un repas en commun termine la réunion mensuelle.

Les activités du Dernier Carré ne se limitent pas aux réunions mensuelles. Il y des visites culturelles du genre Viva Roma, Andy Warhol au musée de la Boverie. Il y a les fabuleuses expositions sur Toutankhamon et Napoléon. Il y a des excusions champêtres dans les bois de Terlamen ou sur les hauteurs d’Aywaille. Il y a les visites touristiques de villes à Verviers, à Diest et autres cités. Il y a la découverte de la centrale hydroélectrique de Coo ou la visite virtuelle des grottes de Lascaux au site préhistorique de Ramioul. Il y a les voyages annuels en direction de la Franconie, de la Corse, de l’Angleterre, de la Bavière, du Val de Loire.

Le vingt-cinquième anniversaire du Dernier Carré a coïncidé avec la pandémie d’où le report à cette année dans les charmes de Thimister. Gisèle Deglin, présidente du Dernier Carré, de dire : Au fil des ans et des changements de mode vie, le Dernier Carré est devenu une association dont les services se révèlent être indispensables pour beaucoup d’entre nous tant son action répond à de véritables besoins. La longévité du Dernier Carré montre aussi que les différents comités ont porté, au travers des années, des projets en phase avec les souhaits, les capacités, l’âge des membres et se sont ouverts au débat.  Cette capacité d’adaptation n’a rien d’évident et mérite d’être saluée.  Car pour maintenir l’association en vie, il ne faut pas seulement avoir des têtes pleines, mais surtout, il faut des cœurs ardents, des oreilles prêtes à écouter, des mains tendues pour aider et offrir de son temps, … beaucoup de temps. 

Le peintre Waxweiler décore une chapelle à Nandrin.

En France, au lendemain de la seconde guerre, de nombreux artistes ont décoré des chapelles notamment sur la Riviera. Que ce soit Pablo Picasso à Vallauris, Henri Matisse à Saint-Paul de Vence ou encore Jean Cocteau à Villefranche-sur-mer, la première des quatre que le poète décora et dont l’une, celle de Saint-Blaise des Simples à Milly-la-Forêt abrite son tombeau.

Par contre, en Wallonie, sauf erreur ou omission, excepté la chapelle Notre-Dame de Bon Secours sur le domaine du baron Van der Linden à Nodebais, dans le Brabant wallon décoré de céramiques polychromes de Miqui, nom d’artiste du baron, Philippe Waxweiler innove en illustrant une chapelle située sur la voie publique à Nandrin. Dédiée elle aussi à Notre-Dame de Bon Secours, c’est une chapelle minuscule – deux prie-Dieu pour tout mobilier devant un autel sobre – connue dans cette commune comme chapelle du Tombeux et Croix.

 Le jour de l’inauguration de la chapelle avec son nouveau décor – un plafond avec un ciel garni de peintures d’oiseaux et de vitraux – José Brouwers, fondateur de la Compagnie royale Théâtre Arlequin, a rappelé la rencontre par hasard de Philippe Waxweiler et cette chapelle livrée à tous vents. Elle a été érigée en 1852 en style néo-gothique et en pierre du pays, pour honorer un vœu, ainsi que le fronton le proclame en latin. L’endroit respire une sérénité combien recherchée dans un monde de bruits et de fureurs. L’artiste se trouve heureux d’y passer un moment de solitude. Il y revient, attiré par un besoin de réflexion qui ne peut s’épanouir que dans un cadre de paix. L’art mène l’artiste à s’interroger.

 Séduit par la proposition de décorer la chapelle du Tombeux et Croix, Michel Lemmens, Bourgmestre socialiste doit au préalable procéder à rénovation et sécurisation de l’édifice. Grâce à tout un travail réalisé par la fabrique d’église, le personnel communal et pour finir, l’artiste, la chapelle est fin prête. Elle peut désormais trouver place dans les monuments et sites remarquables de la commune.

Devant la chapelle, la note religieuse est apportée par la comédienne Delphine Dessambre, directrice de l’Arlequin récitant La Prière du catholique Francis Jammes : Par les gosses battus par l’ivrogne qui rentre, / par l’âne qui reçoit des coups de pied au ventre /et par l’humiliation de l’innocent châtié, / par la vierge qu’on déshabillée, / par le fils dont la mère a été insultée : / Je vous salue, Marie.  

La réception s’est terminée à la Maison communale par un concert du saxophoniste Rhonny Ventat et du pianiste Georges Hermans. Mais l’esprit de la chapelle reste présent par cette confidence de Philippe Waxweiler : j’aime dire que je communique avec Dieu sans intermédiaire dans cette chapelle.

Théâtre Arlequin : Guy de Maupassant, un régal !

La marquise de Rennedou et la baronne de Grangerie sont les héroïnes de trois nouvelles sur les trois cents que Guy de Maupassant a écrites pour le journal Gil Blas dont la devise est Amuser les gens qui passent, leur plaire aujourd’hui et recommencer le lendemain. Le lectorat ? Selon Emile Zola, autre publiciste du quotidien, il se compose surtout de dames qui ne détestent pas les aimables polissonneries. La Compagnie royale Le Théâtre Arlequin en a fait un spectacle Jeu de Dames. Le spectacle n’est jamais monotone tant il se déroule dans un dix-neuvième siècle ou la liberté et l’égalité ne sont qu’un leurre pour les femmes qui ont épousé un homme riche certes mais jaloux, possessif, tyrannique.

José Brouwers a adapté les trois nouvelles de Maupassant, La confidenceSauvée et Le signe précédées d’un prologue mettant en scène l’auteur interprété par Quentin Wasteels. Né en 1850, Guy de Maupassant est exclu du petit séminaire d’Yvetot pour quelques vers licencieux bien innocents par rapport à La feuille de rose farce de rapin dont il fut l’auteur et l’acteur. Parmi ses amis, Flaubert et Eugène Poubelle qui permit aux femmes d’accéder à l’art de guérir, soutint la restauration du divorce en 1884, inventa le tri sélectif … et les poubelles. Adversaire résolu de la Tour des 300 mètres (première appellation de la Tour Eiffel), il en fréquente régulièrement le restaurant. C’est le seul endroit où je ne la voit pas

La confidence : la marquise de Rennedou (Delphine Dessambre) narre à la baronne de la Grangerie (Maïté Wolfs) la manière dont elle s’est vengé de Léon, son mari. Pense à sa tête ! A son gros nez ! … Mais surtout, ne le dis pas… Ne le dis jamais ! Un dialogue entre deux amies spirituelles aux éclats de rire communicatifs.

Sauvée : la nouvelle de Guy de Maupassant date du 22 décembre 1885. Elle traite du divorce rétabli l’année précédente – le 27 juillet – après avoir été aboli le 8 mai 1816 comme poisson révolutionnaire car institué par la Constitution du 3 septembre 1791. La marquise de Rennedou qui a trompé une seule fois son mari Léon est enfin sauvée par le divorce détenant les preuves de l’adultère de celui-ci. 

Un mari devenu odieux, tout à fait odieux, brutal, grossier, despote, ignoble enfin. Je me suis dit : «Ça ne peut pas durer, il me faut le divorce » comme elle le narre à la baronne de la Grangerie tout en lui expliquant avoir engagé une nouvelle femme d’ouvrage en charge de séduire Léon.

Le signe : dans cette nouvelle, la baronne de la Grangerie narre à la marquise de Rennedou les ennuis encourus suite à imiter en mieux le signe d’une voisine légère et volage. Heureusement, la marquise a trouvé la solution pour sortir son amie de ce mauvais pas.

Dans un décor de David Vera construit par Charles Grisard, le spectacle vaut d’être vu tant il est gai, léger et ludique. Marie-Josée Delecour en assure la chorégraphie et la musique est de Luc Baiwir. Jeu de dame est la troisième pièce présentée au programme de l’Arlequin en cette saison 21-22 après L’illusion conjugale d’Eric Assous et Comme s’il en pleuvait de Sébastien Thiéry.

La Compagnie royale Le Théâtre Arlequin fait davantage que mettre à l’affiche des pièces d’auteurs. Ainsi, cette saison, sous le nom de Bords de Scènes à l’issue d’une représentation une rencontre-débat en présence du metteur en scène et des comédiens ont eu lieu. De même, des lectures-spectacles de rentrée ont été organisés tout comme des rencontres d’artistes qui partagent leurs parcours lors d’entretiens conviviaux. Armel Job évoqua du plumier à la plume, Patrick Dheur le piano dans l’âme, José Brouwers 70 ans de scène et Philippe Waxweiler 20 ans de scénographie.  

Autre innovation, le lancement des Amis de l’Arlequin qui témoignent du soutien à l’art vivant et de celui au petit théâtre liégeois préféré.