En trente-neuf ans, Nadine Monfils a publié, selon Wikipedia, quarante-huit romans dont six érotiques et onze consacrés au personnage qu’elle a créé le commissaire Léon, le flic qui tricote. En outre, elle est l’auteur de six pièces de théâtre et a réalisé deux films dont elle a écrit le scénario. Dans la revue Le carnet & les instants, elle déclare : le fantastique me colle à la peau comme le surréalisme (…) J’adore tous les Belges décalés. J’aime profondément Simenon. Je suis très imprégnée de ma culture belge, davantage encore depuis que j’habite Paris.
Édité à Paris, chez Robert Laffont, son quarante-huitième roman se déroule à Liège. Après l’échec à Verviers d’une exposition de ses œuvres dans les caves de Temps mêlés – pas une seule toile vendue – René Magritte dont l’univers et les manies du peintre sont familières à Nadine Monfils, décide de venir se distraire à Liège pendant quelques jours en compagnie de sa femme Georgette et de Loulou, leur petite chienne. C’est la foire. Georgette adore les lacquemants et Loulou baigne dans le bonheur « et surtout dans le sirop qui coulait lorsque sa dadame mordait dans sa gaufre et Magritte adorait les friandises. C’était son coté gamin … Ils logent à l’hôtel Si mais non. En bord de Meuse, ils rencontrent Joseph Malchair, un chanteur des rues, qui soudain pêche un petit pied de fillette dans un soulier doré. D’où le titre du roman Liège en eaux troubles (1). Les Magritte se métamorphosent en détectives privés pour mener une folle enquête.
Ce roman est une extraordinaire carte de visite pour Liège qui séduit où que l’on soit. D’ici, âmon nos autes ou d’ailleurs, à l’international. Que d’endroits cités. Les Olivettes, un café chantant est aux Liégeois ce que le Sacré Coeur est aux Montmartrois. Le cimetière de Robermont, le Père Lachaise liégeois, où Magritte est en admiration devant la statue en marbre d’une jeune femme, d’une étrange beauté, drapée dans une robe transparente au travers de laquelle on voyait pointé son sein droit. Le café Randaxhe, tout autour, la plupart des façades étaient ornées de motifs végétaux et floraux sur les grilles des balcons. Le Cirque divers, un lieu unique (…) où tous ceux qui le souhaitaient pouvaient s’exprimer. Et bien d’autres endroits : les potales d’Outremeuse, les jardins suspendus de Jonfosse, le Kleyer, Hors-Château, le Perron, le Cécile, la Toccata, le Vaudevil, etc. Certains ont disparus, l’Âne rouge, le restaurant Le Boucanier, la Caque, etc. Que de personnalités rencontrées. Le Verviétois René Hausman qui croquait si bien les bestiaires. Le sultan de Bouillon, Michel Antaki le plus liégeois des Liégeois, né à Beyrouth. Cheveux crollés, l’air canaille d’un gamin qui s’apprête à faire une blague. Jacques Lizène, surnommé « le petit maitre ». Georges Simenon, romantique, même naïf, un peu timide … Bouli Lanners, pour moi, le bonheur est dans le potager. Phil le Goupil, la moitié de son sang est le monastère. Et tant d’autres, André Blavier, André Stas, Joseph Klein, Papa Prosper, etc.
Pour encore mieux parler de Liège, Nadine Monfils a été à son écoute. Oufti, ine arègne, hé ne tchoûle nin hein, m’fi, nom di djâle ti, sé-tu, ine pitite gotte, neni hein valèt, binamée, qué novelles, hé binauche, blanke doreye. Une petite cinquantaine de citations de ce genre atteste qu’à Liège, le wallon est encore présent à défaut d’être comme autrefois la langue usuelle de la Principauté.
(1) Liège en eaux troubles – Les folles enquêtes de Magritte et Georgette – Éditions Robert Laffont – Nadine Monfils – 241 pages – 17 €
Mille mercis pour ce super chouette article !
Nadine Monfils
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