Ville de Liège : si les élections communales nous étaient contées … (4/9)

… suite des scrutins jusque en 1971

E.1946

Les premières élections communales liégeoises après la seconde guerre mondiale donnèrent les résultats suivants :

Socialistes      33.895 voix     36,54 %          15 sièges,

Chrétiens        33.589 voix     36,21 %          15 sièges,

Libéraux         12.051 voix     12,99  %         4 sièges,

Communistes 13.230 voix     14,26 %          5 sièges.

Après quatre ans et quatre mois d’occupation, de résignation ou de résistance, après la joie de la Libération le 8 septembre 1944, après les épreuves meurtrières suscitées par la contre-offensive von Runstedt et par les bombes volantes, après la capitulation nazie le 8 mai 1945 et la confirmation des horreurs des camps de concentration ainsi que lors d’une répression de l’incivisme à géométrie variable (les plus riches s’en tirant souvent beaucoup mieux que les petits parfois victimes de circonstances historiques telles que la valse des nationalités dans nos cantons de l’est), le retour aux urnes sur le plan local paraît à Liège avoir été clair. Il n’y eut que quatre listes : celles des deux grands partis le P.S.B. et le P.S.C. qui firent jeu égal chacun obtenant 15 des 39 sièges tandis que les communistes devançaient les libéraux de 1.079 voix et d’un siège, leur cinquième qui leur permettait d’obtenir une majorité de 20 sur 39 avec le P.S.B. Celui-ci continua à indisposer ses bonzes bruxellois en nouant au niveau communal l’alliance de gauche conclue au niveau provincial.

Pendant douze ans le Bourgmestre de Liège fut l’avocat Paul Gruselin, personnage rigoureux qui se retira en 1958 sur les bords de l’Ourthe avec une réputation de misanthrope.

Quant à l’Échevin communiste de la Culture, Paul Renotte (1906-1966), professeur à l’Académie des Beaux-Arts de la Ville de Liège, il remarqua la dégradation de la statue dite des Trois Grâces que sculpta à 70 ans, en 1697, Jean Del Cour pour orner le sommet du Perron et élever la pomme de pin (symbole de l’unité de la nation liégeoise) et la croix (liée au caractère épiscopal de notre Principauté). Aujourd’hui, c’est la copie qu’en réalisa Paul Renotte qui se trouve place du Marché, l’original de Del Cour étant protégé au Grand Curtius après avoir été mieux mis en valeur à l’Hôtel de Ville.

F. 1952 

Alors qu’une candidature bruxelloise hostile empêchait Liège de devenir le siège de la C.E.C.A. (Communauté européenne du charbon et de l’acier) et après les durs affrontements de la question royale en août 1950 et à la veille du déclenchement de la guerre scolaire, les options majoritaires des Liégeois ne laissèrent guère de doute : ils renforcèrent les anticléricaux puisque les Libéraux doublèrent leur nombre de sièges au détriment du P.S.C, les Socialistes eux, dans un climat de guerre froide (et parfois chaude comme en Corée) se détachant en première place au détriment des communistes, la répartition des 39 sièges (18, 11, 8, 2) se passant de commentaires.

Socialistes      39.364 voix     41,81 %          18 sièges,

Chrétiens        26.205 voix     27,84 %          11 sièges

Libéraux         19.252 voix     20,45 %          8 sièges

Communistes  7.633 voix       7,83 %            2 sièges.

G. 1958

Six ans plus tard les sociaux-chrétiens reprirent un siège à chacun des trois autres partis :

Socialistes           38.393 voix     41,83 %          17 sièges,

Chrétiens             30.950 voix     33,74 %          14 sièges,

Libéraux              17.139 voix     18,68 %          7 sièges,

Communistes       4584 voix        5,00 %            1 siège.

Il y a soixante ans alors que se déroulait à Bruxelles l’Expo en compensation de laquelle Liège avait été autorisée à emprunter pour construire le Palais des Congrès inauguré alors et à se jumeler avec une des Villes (Lille, Rotterdam, Cologne, Turin et … Esch-sur-Alzette) de chacun des cinq autres Etats ayant l’année précédente signé à Rome le traité instituant un Marché commun, c’est sous l’impulsion de jeunes alors très à droite comme Jean-Pierre Grafé, que le P.S.C. reprit du poil de la bête et  proposa le maïorat à l’ancien ministre libéral des Colonies, l’avocat Auguste Buisseret. Avec le Ministre d’État Maurice Destenay à l’instruction publique, l’historien de notre Université Jean Lejeune aux travaux, Jean-Pierre Grafé aux services sociaux, Jean Raymond, Premier Échevin à l’État civil etc…, ce Collège allait devoir affronter des événements comme ceux de la grève de l’hiver 1960-61 contre des mesures jugées de régression sociale et pour le fédéralisme.

H. 1964

Six ans plus tard, les 75 % de votes valables du P.S.B. et du P.S.C. descendirent à 50 % :

Socialistes                       26.181 voix     31,22 %          13 sièges,

Chrétiens                         16.028 voix     18,9 %            7 sièges,

Libéraux                          24584 voix      28,99 %          13 sièges,

Communistes                  9095 voix        10,72 %          4 sièges,

Démocratie chrétienne   6.583 voix       7,76 %            2 Sièges.

Nouveau séisme électoral : les socialistes en conflit avec les renardistes de la F.G.T.B. wallonne perdent 10% des votes valables et 4 de leurs 17 sièges. Ils sont rejoints en nombre de sièges par les Libéraux (d’Omer Vanaudenhove : Mon parti c’est mon pays) qui dépassent allègrement le P.S.C. et chez lesquels à Auguste Buisseret avait succédé Maurice Destenay entouré d’une équipe dynamique comprenant Georges Goldine, Hubert Pirotte, Joseph América… sans oublier Madeleine Langevin car Moi j’aime bien Madame Langevin.

Sous l’impulsion de René Beelen qui avait pris le risque de déstaliniser en Belgique avant le XXème congrès du parti communiste de l’Union soviétique, les communistes se redressèrent alors passant de 5 à 10 % des voix et d’un à quatre sièges.

I. 1970 (sur 41 sièges et non 39)

En 1970, alors que les incompatibilités entre dirigeants liégeois du Parti Socialiste Belge et du Mouvement Populaire Wallon s’atténuent, le Rassemblement Wallon conduit par François Perin et Jean Gol obtient néanmoins d’emblée six sièges au Conseil communal tandis que chez les Libéraux c’est la scission entre orthodoxe du P.L.P. et l’équipe du Bourgmestre Destenay, échaudée par l’annexion des Fourons au Limbourg et la scission de l’Université de Louvain aux cris de Walen buiten !. La liste du Bourgmestre malgré la présence d’une liste officielle du P.L.P. conduite par l’Échevin Tilman chargé de l’enseignement communal confirme que les Liégeois préfèrent les rebelles puisqu’ils donnent 12 sièges à Maurice Destenay, onze aux Socialistes conduits par l’Échevin des Travaux Charles Bailly et … 2 à l’Échevin P.L.P. Tilman. Le P.S.C. regagne un siège au moment où la Démocratie Chrétienne autonome disparaît et que  les communistes perdent la moitié de leurs 4 sièges.

Voici les scores de ce scrutin de 1970 :

Socialistes                       19.447 voix     23,60 %          11 sièges,

Chrétiens                         15.383 voix     18,66 %          8 sièges,

Libéraux                          6.273 voix       7,62 %            2 sièges

(Liste P.L.P. officielle de l’Échevin sortant Tilman),

Communistes                  5.469 voix       6,64 %            2 sièges,

Rassemblement wallon   12.314 voix     14,94 %          6 sièges,

Libéraux                          21.584 voix     26,19 %          12 sièges

(Liste libérale liégeoise du Bourgmestre Destenay),

Parti vitaliste de Frère Alfred 1.162 voix dont à défaut de siège il compte se servir pour se faire entendre.

Suite à une plainte de quatre candidats P.S.C. non élus, la Députation permanente du Conseil provincial avait par quatre voix (le Gouverneur Clerdent et ses membres socialistes, les trois sociaux-chrétiens s’abstenant) validé les élections communales du 11 Octobre 1970 à Liège. Mais ensuite écrit le C.R.I.S.P. le Conseil d’Etat annulera les élections liégeoises en se basant uniquement sur le fait que les électeurs non convoqués (ou trop tard) auraient pu modifier la dévolution des sièges au sein d’une même liste. Le P.S.C. était mécontent du fait que l’Union socialiste communale de Liège ait lors d’un vote serré (200 voix contre 185) de son assemblée générale préféré une alliance PSB Destenay (11 + 12 = 23 / 41) à une tripartite P.S.B., P.S.C. et P.C.B.(11 + 8 + 2 sièges = 21/41). L’option prise en 1970 ne fut pas remise en cause en 1971.

J. 1971 (suite à l’annulation du scrutin de 1970)

Quasi du Bis repetita placent :

Socialistes                       19.781 voix     24,43 %          11 sièges,

Chrétiens                         18.331 voix     22,77 %          11 sièges,

Libéraux                             2.809 voix       3,49 %            0 siège

(Liste P.L.P. officielle conduite par M. Houssa),

Communistes                  4.567 voix       5,67 %            1 siège,

Libéraux                          21.690 voix     26,94 %          13 sièges

(Liste libérale liégeoise du Bourgmestre Destenay),

Rassemblement wallon   9.327 voix       11,59 %          5 sièges,

Frère Alfred dont le score a plus que doublé (2.436 voix soit plus de 3%) pour défendre le pain gris.

L’alliance P.S.B. 11 Liste Destenay 13 (+1) gagne un siège (24/41) et le P.S.C. 3 tandis que le R.W. et le P.C.B. en perdent un et que le P.L.P. officiel est enterré à Liège (- 2 = 0). Au décès du Bourgmestre Maurice Destenay, c’est le Socialiste Charles Bailly qui le remplace lui qui, dans sa jeunesse, s’engagea en Espagne dans les Brigades internationales anti-franquistes et devint officier mitrailleur chez les trotskystes du POUM (le parti ouvrier marxiste). Cela ne conduisit pas à la Révolution mais au sein du Royaume, aux fusions de communes imposées aux socialistes minoritaires et qui se révélèrent trop petites pour les grandes choses et trop grandes pour les petites.

Jean-Marie ROBERTI 

Illustration Maurice Destenay                                         (à suivre)

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