Alice Piemme/AML ©
Cette année diverses circonstances nous amènent à ne pouvoir apprécier lors de ce cinquante neuvième festival spadois que quatre spectacles, un pour chacune des deux premières (les 8 et 9 août) et des deux dernières (les 18 et 19 août) soirées.
Pour l’ouverture, quatre possibilités étaient offertes: un grand spectacle tchèque des frères Forman, à la fois cirque et cabaret, une création traduite de l’anglais (« Toutes les choses géniales » de Duncan MacMilan), un spectacle en partie musical « Juke-Box Opéra » et enfin une production du Théâtre de la Toison d’Or: « Cherche l’amour » de Myriam Leroy. La directrice de cet établissement scénique bruxellois Nathalie Uffner, déclare être « tombée » sur cette autrice journaliste lors de sa quête perpétuelle d’auteurs qui ne sont pas « estampillés Théââââââââââtre ». Nous ignorons quelle estampille attribuer à cette metteuse en scène mais elle devrait d’abord veiller à ce que les comédiens soient constamment audibles, les décrochages s’avérant fréquents partout et insupportables au fond du parterre et au balcon où un couple d’amis relégué par erreur à l’étage partit après 20 minutes car il n’entendait rien de cohérent. Les fâcheux accents imposés aux acteurs aggravèrent la mauvaise audition d’une soirée pénible. À oublier.
Par contre, quel plaisir que la découverte de l’autobiographie sans doute romancée mais très agréablement musicale que nous a présenté Julie Mossay, soprano de l’arrondissement de Verviers, qui a raconté ses souvenirs au talentueux Paul Pourveur qui en a fait un texte intéressant. On nous annonçait une prestation de la cantatrice basée sur deux piliers : un comédien interlocuteur de tous les moments de sa vie et un pianiste hors pair l’accompagnant sur tous les modes d’expression musicale. Patatras: le comédien Didier de Neck était alité et le pianiste Johan Dupont se trouvait aux côtés de sa femme qui accouchait quelques jours avant la date prévue de leur premier enfant. Allait-on devoir rembourser ? Le directeur du Festival Axel de Booseré réalisateur de ce spectacle avec Maggy Jacot en décida autrement. Il répartit le texte de Paul Pourveur entre trois comédiens : Olivier Massart (très subtil interprète du père de l’artiste), Mireille Bailly et lui-même et le pianiste Fabian Fiorini remplit de manière remarquable les nombreuses prestations de Johan Dupont. Et la réussite fut superbe; de la friterie paternelle au peu apprécié Concours Reine Elisabeth. Avec des instants de grâce exceptionnelle comme lors de l’interprétation de l’air de Michaela extrait du Carmen de Bizet (« Je dis que rien m’épouvante…. »).
On débuta par le « J’aime la vie » avec lequel Sandra Kim remporta l’Eurovision à Bergen il y a près d’un tiers de siècle (en 1986). Nous passâmes par les compositions de Michel Berger (Starmania, le Monde est stone…) et par du Franz Lehar avec qui l’opérette vaut bien des opéras et encore et surtout par ceux-ci: la valse de Juliette (« Je veux vivre ») dans l’opéra Roméo et Juliette de Gounod, la Mimi de la Bohème de Puccini, la Tosca de Verdi, la Flûte enchantée de Mozart, ce génie qui engendra la passion de Julie Mossay dont ce spectacle carte de visite démontre un très grand talent aux multiples facettes. Et quelle gageure pleinement réussie que cette représentation assurée au pied levé : un enchantement.
Bravo, bravissimo !
SIMPLE QUESTION
La direction et les collaborateurs de l’estival festival spadois soulignent et tentent d’expliquer l’abandon (que nous déplorons) du mot « théâtre » dans l’intitulé d’une manifestation culturelle qui aura soixante ans en 2019. En voyant partout s’afficher la nouvelle appellation « Royal Festival » nous nous posons une simple question. Remplacer le titre Festival royal de théâtre de Spa (où l’adjectif royal a été obtenu sans problème après un demi-siècle d’activités) par Royal Festival (où la qualification de l’initiative définit seule celle-ci), change la nature même de cette organisation spadoise. J’imagine les mots « Royal Festival » utilisés au Royaume-Uni, en Suède, en Norvège, au Danemark ou en Espagne, ils donneraient un caractère prestigieux aux spectacles annoncés dans un tel cadre. Chez nous le Palais Royal a-t-il été informé et a-t-il donné son accord avant l’utilisation des mots « Royal Festival » ? Si ce n’était pas le cas, cela signifierait-il qu’il convient de ne pas tenir compte de la monarchie en notre Royaume? … Simple question.
Jean-Marie Roberti