Feuilleton : LES IFUAGOS ET L’ANVERSOISE par Oncle Bob 3/4

       Ce moment très émouvant nous le retrouverons à Bontoc avec la surprise réservée par Enrique, la rencontre avec sœur Basile. Pour Bogdan comme pour moi-même, si les religions, comme le disait Marx, sont l’opium des peuples, nous avons gardé un très grand respect pour tous les vrais croyants qu’ils soient animistes, chrétiens , musulmans, juifs… Notre éducation laïque nous a permis de conserver le sens du sacré. Nous le constaterons par ailleurs, certains catholiques, eux, notamment sœur Basile, s’éloignent de la pure orthodoxie pour s’inscrire dans des comportements atypiques.

                                        

       Cette sœur missionnaire belge d’origine flamande est membre de la congrégation des sœurs de l’immaculée conception. C’est en 1925, après avoir effectué des études d’infirmière à Anvers qu’elle s’établit à Bontoc avec une coreligionnaire. Sa première mission consiste à se faire accepter par la population. Par des actions concrètes de soins, d’éducation et l’écoute des autres elle parvient à s’intégrer progressivement. Cette femme possède une volonté de fer, un sens de la tolérance qui lui permet d’accepter l’animisme ambiant et d’insérer Jésus parmi les divinités locales sans s’exposer à des rejets. Petite, les traits marqués sous les petites lunettes rondes, l’œil vif et coquin, elle trottine en se réjouissant de nous parler dans la langue de Vondel. Bogdan et moi la tenons par le bras et déambulons dans son musée en partie à ciel ouvert.

       Sœur Basile nous apparaît avant tout comme une ethnologue, une anthropologue beaucoup plus qualifiée que certains experts. Dans la partie couverte du musée elle a rassemblé des costumes, des outils, des instruments de musique, des armes blanches et des sculptures en bois; notamment ‘‘les bulols ‘‘ces pièces censées protéger les cultures rizicoles.

       L’envie me titille d‘ évoquer les coupeurs de têtes mais c’est elle-même qui en parle. Elle indique que cette coutume donnait du prestige aux hommes et était acceptée par la société. Elle a connu l’époque où certains hommes portaient accrochés à la ceinture les têtes réduites de leurs adversaires. Elle nous explique qu’après réduction de la tête, la mâchoire était transpercée pour y glisser un lacet de cuir. La tête était alors attachée à la ceinture du vainqueur.

                           ( à suivre )