Dans les pays ayant la langue française en partage, le mois de mars est devenu, depuis 1990, celui de la francophonie. Depuis 1911, c’est aussi en mars que, en divers pays, se célèbre la journée des femmes. En 1977, l’ONU décrète le 8 mars Journée Internationale des Droits des Femmes. Deux événements qui n’ont pas échappé à Edmond Blattchen pour choisir l’invité de noms de dieux diffusé ce mardi, sur la Deux, vers 22h45 (1). Mieux, son invité est qualifié le biographe de Dieu auquel il parle d’égal à égal.
L’invité d’Edmond Blattchen est Jean d’Ormesson qui se définit comme un oximore. Il dit avoir été élevé dans la religion catholique (…) je ne l’ai pas quitté (…) je crois qu’il y a pas de preuve que Dieu existe mais nous mourrons d’espérer que Dieu existe.
Élu le 18 octobre 1973, Jean d’Ormesson est le plus ancien membre de l’Académie française actuelle. Dès sa création, en 1635, l’Académie est chargée de veiller sur la langue française. Elle en maintient la qualité et suit les évolutions telle la création en 1970 de la Francophonie par des chefs d’États devenus indépendants après avoir été colonies françaises ou sous protectorat. En 1986, en même temps que la Francophonie se réunit en Sommet, l’Académie décerne le Grand Prix de la Francophonie à une œuvre contribuant au rayonnement de la langue française dans le monde.
Dès sa création jusqu’au 6 mars 1980, l’Académie n’a élu que des hommes. Marguerite Yourcenar est la première Académicienne. Le jeudi 22 janvier 1981, le principal artisan de cette Révolution, Jean d’Ormesson déclare : Madame, C’est une grande joie pour moi de vous souhaiter la bienvenue dans cette vieille et illustre maison où vous êtes, non pas certes le premier venu, mais enfin la première venue, une espèce d’apax du vocabulaire académique, une révolution pacifique et vivante, et où vous constituez peut-être, à vous toute seule, un des événements les plus considérables d’une longue et glorieuse histoire.
Je ne vous cacherai pas, Madame, que ce n’est pas parce que vous êtes une femme que vous êtes ici aujourd’hui : c’est parce que vous êtes un grand écrivain. Être une femme ne suffit toujours pas pour s’asseoir sous la Coupole. Mais être une femme ne suffit plus pour être empêchée de s’y asseoir. Nous vous aurions élue aussi − et peut-être, je l’avoue, plus aisément et plus vite − si vous étiez un homme. Plût au ciel que les hommes que nous avons choisis depuis trois cent cinquante, ans eussent tous l’immense talent de la femme que vous êtes (…) Nous avons simplement cherché à être fidèles à notre vocation traditionnelle qui est de trouver − si faire se peut − dans les lettres françaises ce qu’il y a de meilleur, de plus digne, de plus durable. Avec vous, Madame, nous y avons réussi.
En recevant Jean d’Ormesson, noms de dieux est assuré d’offrir érudition et humour. Érudit, il a choisi une phrase de Platon : il faut aller à la vérité de toute son âme. Et de conter la réponse de sa fille alors qu’enfant, on lui demande que fait ton papa ? : mon papa, quand il écrit avec un stylo, il va très vite, c’est pour Le Figaro et quand il écrit avec un crayon, il est très lent, c’est un roman. Il en a écrit trente-six. le premier publié, en 1956, L’amour est un plaisir et le dernier, en 2010, C’est une chose étrange à la fin du monde. Question à cinq sous : quel objet a choisi Jean d’Ormesson pour le chapitre symbole ?
De droite à gauche : Jean d’Ormesson (Académie française), Pierre André (Liège 28), José Brouwers (Théâtre Arlequin). Photo ; © Gérard Dewonck
(1) Rediffusion sur la deux, en boucle dès 0h25, la nuit du 10 au 11 mars. Sur le site www.rtbf.be, rubrique revoir, durant une semaine dès mercredi 9 mars, midi.