Le train et Liège, c’est une longue histoire d’amour. Dès avant la Révolution belge, dans le « Mathieu Laensberg », le Liégeois Charles Rogier fait campagne en faveur du chemin de fer. Arrivé au pouvoir, Charles Rogier fait adopter, en 1834, la loi dotant la Belgique d’un réseau ferroviaire. Nouveau maillon de cette histoire d’amour, ce vendredi 18, Liège a inauguré sa nouvelle gare TGV conçue par Santiago Calatrava, la gare des Guillemins.
« Gare des Guillemins » car, comme l’a dit Jannie Haek, patron de la SNCB-Holding, « quand vous reconstruisez votre maison, vous ne lui donnez pas le nom de l’architecte ». Ces propos ont été tenus dans la salle académique de l’Université de Liège, le 8 mai dernier, en présence du Bourgmestre et du Recteur.
La nouvelle gare des Guillemins est une cathédrale d’aujourd’hui toute blanche comme les cathédrales d’autrefois l’ont été en leur temps. Tout en lumière à l’image des Lumières qu’au XVIIIème siècle, les Guillemins font transiter de France vers les huguenots de Hollande. Pour rester dans l’esprit de lumière, nous soumettons à la réflexion d’Infrabel, la suggestion de faire précéder les annonces de services d’une signature musicale reprenant les premières notes du « Valeureux Liégeois » de Ramoux. A gare exceptionnelle, signature musicale exceptionnelle. Pour mémoire, Gilles-Joseph Ramoux a été l’initiateur de la Société d’Emulation dont le président d’honneur a été François-Charles de Velbrück, prince-évêque éclairé.
Blancheur, lumière, pureté. Le train est le mode de transport motorisé qui émet de moins de CO2 responsable du réchauffement climatique. « Si les émissions de CO2 par le transport sont un problème, le train est, lui, la solution » se plaît à répéter Jannie Haek. Aussi, en 2010, l’année où la Belgique assure durant six mois la présidence de l’Union européenne et où Liège est Métropole culturelle de la Wallonie, la SNCB met un plateau de son parking à disposition de l’exposition « SOS PLANET ».
Sous la supervision scientifique du climatologue Jean-Pascal van Ypersele, vice-Président du GIEC – « Je suis ici à titre personnel, ce n’est pas un patronage du GIEC » -, l’exposition « SOS PLANET » s’adresse au grand public. « Elle a pour objectif de dresser le bilan de la situation, dégager des pistes crédibles pour l’avenir du climat et sensibiliser le plus grand nombre aux enjeux climatiques du futur ».
Erreur dans l’article,c’est JB Nothomb, premier ministre des Travaux publics de la Belgique, qui entreprend de réaliser un réseau ferré sur le territoire national, et non Rogier qui lui succédera à cette fonction.
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Merci de lire « Liège 28 » avec un esprit critique.
Vous évoquez une « erreur dans l’article ». « L’erreur » consiste à avoir écrit : « Arrivé au pouvoir, Charles Rogier fait adopter, en 1834, la loi dotant la Belgique d’un réseau ferroviaire »
Voyons les choses paisiblement et chronologiquement.
Sous le régime hollandais, dès la création en avril 1824, du journal Mathieu Laensberg, Charles Rogier demande, à plusieurs reprises, la création d’un « chemin à ornières ». C’est sous ce nom, qu’à l’époque, on désigne le chemin de fer.
Dans la Belgique indépendante, Charles Rogier est nommé ministre de l’Intérieur, le 20 octobre 1832 dans le deuxième gouvernement du règne du Roi Léopold 1er. Il démissionne de ce poste le 1er août 1834.
Le 1er mai 1834, une loi décide de la création par l’État de prés de 400 kms de voies ferrées.
Le 5 mai 1835, à l’Allée verte, à Bruxelles, quelques 900 personnes prennent place à bord de 3 trains à destination de Malines.
Le 13 janvier 1837, un nouveau département ministériel est créé. Désormais, la Belgique compte un Ministre des Travaux Publics.
Le premier titulaire est un de vos ancêtres, Jean-Baptiste Nothomb. Il reste ministre des Travaux Publics jusqu’au 17 avril 1840. Par la suite, en avril 1841, Jean-Baptiste Nothomb est ministre de l’Intérieur.
En 1838, la ligne reliant Bruxelles est aux portes de Liège. Elle arrive à Ans comme le fait aujourd’hui, en cyclisme, la Doyenne conservant son nom de Liège-Bastogne-Liège.
Pour parvenir à Liège situé dans la vallée de la Meuse, il est nécessaire de vaincre une dernière difficulté, la cote d’Ans.
L’ingénieur Henri Maus trouve la solution : un plan incliné.
Le 1er mai 1842, la ligne arrive à Liège Haut-Pré. Le plan incliné est utilisé jusqu’en 1871
Charles Rogier devient le 18 avril 1840 le deuxième titulaire du département des Travaux Publics. Il le demeure jusqu’au 12 avril 1841.
En 1843, le réseau ferroviaire de l’État belge est de quelques 560 kms.
Dès 1844, l’Etat accorde des concessions au privé pour continuer le développement de ce réseau.
En conclusion, nous citerons, in extenso, les pages de la Biographie Nationale de l’Académie royale de Belgique consacrées à Charles Rogier :
« De ce ministère de Rogier datent la première exposition des beaux-arts (15 août 1833), la révision de la loi sur la garde civique, la réorganisation du conservatoire de Bruxelles, la création des archives publiques, et surtout son
oeuvre la plus belle, celle qui, à elle seule, suffirait pour rendre sa mémoire impérissable, le chemin de fer.
Ces mots devaient finir par remplacer officiellement ceux de « route en fer », « chemin à ornières, chemin en fer » qui avaient été employés auparavant, en 1824, Rogier, dans le Mat/iieu Laensbergli, parlait déjà du « chemin à ornières » et qui le furent longtemps encore dans les discussions et les rapports parlementaires.
Le 19 juin 1833 Rogier donna lecture à la Chambre de l’exposé des motifs d’un projet de loi autorisant un emprunt de 18 millions affecté à l’établissement de la première partie de la route en fer de la mer à l’Escaut, à la Meuse et au Rhin. En même temps étaient déposés les tableaux, plans et calculs à l’appui du projet.
Les sections de la Chambre le discutèrent longtemps. Le rapport de la section centrale qui l’adopta ne fut déposé que le 23 novembre. Le mauvais vouloir de quelques députés en fit retarder la discussion jusqu’au 10 mars 1834.
Rogier commença par rappeler que, déjà au commencement d’octobre 1830, il avait lancé l’idée de cette entreprise qui devait doter le pays d’immenses bienfaits et à laquelle ses collègues du gouvernement provisoire s’étaient ralliés à la nouvelle
du bombardement d’Anvers.
« … Vous voulez, sans doute, interrompit Dumortier, qu’on dise la voie Rogiérienne comme on disait la voie Appienne… ». « Que la voie soit Dumortérienne ou antidumortérienne ». riposta Rogier, elle est nationale ! Il ne suffit pan à la révolution belge d’avoir donné au pays la Constitution la plus libérale ; elle doit compléter son oeuvre par un fait matériel de la plus haute portée. Cette entreprise sera aux intérêts matériels du pays ce qu’est notre Constitution à ses intérêts moraux ».
Il avait, sur la proposition de la section centrale, élargi son projet initial : le railway passerait par Malines, Louvain, Tirlemont, Liège, avec deux embranchements : de Malines sur Bruxelles et la France par Namur, Mons ou Charleroi et de Malines sur l’Angleterre par Terînonde, Gand, Bruges et Ostende.
Pendant la discussion, où il montra une habileté rare, il s’empressa de faire droit aux réclamations et de calmer des plaintes qui lui paraissaient légitimes, quoique certaines d’entre elles fussent exprimées dans un langage presque révolutionnaire.
Mais si des réclamations et des plaintes étaient marquées au coin de la fantaisie ou révélaient l’ignorance des principes les plus élémentaires de l’économie politique, — et il y en eut plus d’une — il employait, pour les écarter, le langage de la plaisanterie courtoise qu’il maniait très bien.
Secondé efficacement par le rapporteur de la section centrale, Smits, et par Nothomb et Devaux, il finit par avoir raison d’une hostilité qui faisait arme de tout.
C’est à son argumentation, sobre et vigoureuse tout à la fois, qu’il dut de faire résoudre affirmativement, par 55 voix contre 35, cette question de principe si
importante : les routes en fer portées au projet seront elles faites par le gouvernement?
Il s’éleva à la véritable éloquence le jour où il démontra que la Belgique pourrait conquérir l’indépendance commerciale non point par la guerre, dont les chances seraient incertaines, mais par le grand travail d’art qu’il préconisait, et qu’elle commettrait un véritable suicide si elle abandonnait le marché de l’Allemagne à la Hollande, aux villes hanséatiques et à la France.
« Gloire », disait-il, « à la nation qui, à trois années de sa naissance, après avoir traversé des jours mauvais, se montrerait l’égale des plus fortes et des plus anciennes; qui, enchaînée et mutilée, hélas ! en deux de ses parties, saurait se redresser sur elle-même et puiser dans ses propres forces des germes de vie et de gloire ! C’est à de tels signes que se reconnaît la véritable grandeur d’un peuple; c’est par de telles victoires qu’on égale et qu’on justifie d’anciens triomphes, que l’on conquiert ce qui peut rester de Belges hostiles ou indifférents à la Belgique, que l’on fortifie le sentiment national, que l’on obtient l’estime, la considération, les sympathies de l’étranger… ».
L’ensemble du projet, voté le 28 mars par cinquante-six représentants contre vingt-huit et une abstention, le fut au Sénat par trente-deux voix contre huit et trois abstentions. Le roi sanctionna la loi le 1er mai 1834 ».
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