A moins de dix kilomètres de la mer, en Côte d’Opale, sur des terres confiées, début du XIIème siècle, aux moines de Saint-Bertin de l’abbaye de Saint-Omer par Robert II, retour de croisade, se trouve la ville de Bourbourg. Les moines y ont accueilli d’autres abbayes et couvents. Ils y ont édifié une église, l’église Saint-Jean Baptiste, fierté des Bourbouriennes et Bourbouriens jusqu’à ce jour funeste de 1940.
Ce jour-là, un avion en flammes survole l’église avant de s’écraser au sol. Images de désolation, la voûte s’est effondrée et le grand chœur gothique est ravagé. Le culte se poursuit dans un espace limité. Le plus grand chœur gothique au Nord de Paris est laissé à l’abandon.
A la fin du siècle dernier, le ministère de la Culture et de la Communication décide de passer une « commande publique » qui marque la volonté de l’Etat, en association avec de multiples partenaires, de contribuer à l’enrichissement du cadre de vie et au développement du patrimoine national, par la présence d’oeuvres d’art.
En début du XXIème, le choix de l’artiste, réalisateur de la commande publique, se porte sur une des figures marquantes de la sculpture anglaise et internationale, Sir Anthony Caro, le dernier assistant de Henry Moore, par ailleurs, docteur honoris causa de l’Université de Lille
Le maire de Bourbourg, Francis Bassemon raconte : « Lors de sa première visite, il est marqué par l’ampleur du choeur et sa charge de mémoire qu’il relie très vite aux événements de la Deuxième Guerre mondiale. Cette empreinte forte de l’histoire laissée dans la pierre de l’église, par l’incendie dévastateur de Mai 1940 et par les avatars du temps, compte beaucoup dans l’engagement et l’ardeur manifestés depuis sept ans par Anthony Caro, qui y trouve un lieu d’inspiration et d’expression correspondant à son évolution personnelle. L’artiste s’engage dès lors dans une recherche qui vise à faire du choeur gothique une chapelle de l’espérance et un lieu de méditation ouvert à tous ».
Sir Anthony Caro explique sa conception de l’œuvre « Le chœur de lumière » qui s’inspire de l’histoire de la région. « Cette partie de la France a été battue guerre après guerre, par les armées de différentes nations, et je sens que le choeur devrait être un monument à la mémoire de ceux qui ont souffert et qui sont morts. Pour cette raison, j’ai choisi l’idée d’un lieu de méditation et de vénération pour quiconque, toute religion confondue ». Sir Anthony Caro avoue avoir « du respecter l’architecture en place, sans pour autant me laisser dominer par elle ».
Désacralisé, le chœur retrouve son usage cultuel. Ce qui réjouit l’Archevêque de Lille, Laurent Ulrich : « Anthony Caro a édifié dans le choeur un baptistère monumental qui permettra de conférer le baptême des enfants et des adultes par ablution (un peu d’eau versée sur le front) et aussi par immersion, comme cela se pratiquait habituellement dans les premières communautés chrétiennes ».
Pour le délégué aux arts plastiques au sein du ministère de la Culture et de la Communication, Olivier Kaeppelin : « Le choeur surplombe de quelques marches l’avant-choeur, il accueille en son centre la cuve baptismale.(…) A la périphérie des fonts se tiennent les neuf niches qui habitent la paroi verticale de l’abside. Chaque niche héberge un haut-relief, sculpture assemblée de terre cuite et de feuilles d’acier. Les thèmes de l’eau et de la création du monde sont la source d’inspiration de ce récit ondoyant animé d’un mouvement continu de plis, failles et chevauchements. Cette séquence de terre et d’acier mêlés exprime les mouvements de matière et de vie d’un paysage initial ».
A la vérité, « le chœur de lumière » – http://www.lechoeurdelumière.fr – vaut la visite. Inauguré le 11 octobre 2008, c’est surprenant. Chacun circule sur les 450 mètres carrés d’un blanc immaculé mettant en valeur ce chef-d’ œuvre d’art sacré. Afin de conserver ce blanc immaculé du sol, le visiteur revêt des chaussons. Sans l’avoir vu de nos yeux vu, il nous a été assuré que les techniciennes de surface ont recours à des brosses à dent pour nettoyer les interstices du sol !
Ce chef-d’œuvre a eu un coût : 2 971 293 €. L’Union européenne a contribué pour 628.400 € par l’intermédiaire du Fonds Européen de Développent Régional (FEDER). Grâce au FEDER, « le chœur de lumière lieu de méditation et de vénération pour quiconque, toute religion confondue » appartient un peu à chaque Européen.
Ce beau texte donne vraiment l’envie d’aller y voir de ses propres yeux !
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