En avril 1945, à Bendesdorf, une certaine odeur d’encens …

        Sur instructions du ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht, Frank de Coninck, ambassadeur belge auprès du Saint-Siège a fait part, le 15 avril, au Secrétaire pour les Relations du Saint-Siège avec les Etats, de la résolution adoptée, le 2 avril, à la Chambre (par 95 oui, 18 non, 7 abstentions) demandant au gouvernement belge de « condamner les propos inacceptables du pape lors de son voyage en Afrique et de protester officiellement auprès du Saint-Siège ». La Secrétairerie d’Etat « prend acte avec regret de cette démarche, inhabituelle dans les relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la Belgique ».

        Dans le communiqué de la salle de presse papale diffusé par VISnews, le 17 avril, le mot « préservatif » n’est jamais utilisé. En revanche, il y est question « d’un certain moyen prophylactique dans la lutte contre le SIDA ». Au Vatican, après les remous du dernier périple de Benoît XVI, le mot semble aussi tabou que l’objet l’a été, pour un couple de réfugiés, en avril 1945, à Bendesdorf, une petite localité proche de Hambourg.

        Dans ses Mémoires « Sur mes traces », l’écrivain Gregor von Rezzori raconte que l’air y pue. La raison ? Dans un convoi sanitaire abandonné lors de l’ultime débâcle allemande, ce couple de réfugiés s’empare de deux caisses. Ils y découvrent « à leur grande horreur qu’elles étaient remplies de préservatifs. Un trésor. Une vraie aubaine. Une seule de ces caisses avait plus de valeur au marché noir que tout le reste du butin. Mais pas pour nos braves bourgeois de Rhénanie. Ils étaient scandalisés. Hors d’eux, indignés et dégoûtés, ils avaient brûlés, un à un, sur la flamme d’une bougie, ces machins en caoutchouc aussi solides qu’abjects à leurs yeux. C’était cette puanteur qui se diffusait dans l’air printanier ».